Elle voudrait éteindre la lumière, remonter la couette et simplement fermer les yeux, mais il n’en est rien.
Elle se relève, son téléphone à la main pour l’éclairer et s’approche de son tout-petit pour l’entendre respirer… Cela dure 3 secondes, guère plus, mais cela suffit à la rassurer…
A pas de loup, elle quitte la première chambre et fait irruption dans la seconde, avec la même minutie comme s’il y avait une bombe. Les ronflements la rassurent, mais c’est la couette et cette jambe qui ne veut jamais rester en place qui ont toute son attention et c’est avec précision, dans la pénombre qu’elle réajuste la position de son petit champion.
Elle se retrouve sur le palier des chambres un peu désorientée, comme si elle avait oublié ce qu’elle venait chercher.
Etourdie et résignée, elle retourne se coucher. Elle jette un dernier coup d’œil sur son téléphone, vérifie les notifications, les pouces levés ou les cœurs affichés : Instagram, Facebook, elle ne peut s’en empêcher.
Il est tant, grand temps de débrancher, pour autant elle ne va pas y arriver. Elle prendrait bien un livre, mais elle serait bien capable de le terminer.
D’une main elle éteint l’écran, de l’autre amorce un pénible retournement et se persuade que c’est l’heure, oui l’heure de dormir profondément.
Ajuster l’oreiller, se caler, rassembler les paumes et ne pas oublier de prier, de remercier Dieu pour cette journée écoulée et fermer les yeux plus fort.
Fermer les yeux et dormir, le rêve, le luxe qu’elle ne s’offre pas. Sa tête et son esprit son très forts à ce jeu là et la torture commencera là.
Et si ?
Et pourquoi ?
Et combien ?
Et pourquoi pas ?
Et quand ?
Et qui ?
Et j’aurai dû…
Et j’aurai pu…
Et si j’avais…
Un tourbillon d’interrogations, de doute, d’images qui repassent dans sa tête et son cœur qui s’emballe.
Elle est persuadée qu’elle n’est pas normale…
Elle est fatiguée, si fatiguée pourtant, physiquement et moralement elle devrait dormir à présent.
Perfectionniste, hyper sensible, le cerveau toujours bouillant, peu de gens le savent, mais c’est éprouvant et paradoxalement épuisant, même si le marchand de sable ne fait pas semblant.
Alors elle repousse cet instant… Elle voudrait juste pouvoir s’étendre et étirer tous ses membres. Attendre patiemment sans réfléchir que son cerveau sache bien se tenir.
Faire, défaire, envisager, écrire, imaginer, avoir peur d’oublier et vouloir oublier, vouloir se laisser aller.
Partir… Dormir, sans compter, dormir sans compter, ne pas se rendre compte qu’elle s’est endormie sans difficulté.
Avant de s’endormir, chaque soir, elle se plaît à divaguer…
Tantôt heureuse, tantôt fâchée, bien souvent très inspirée, elle repousse encore et encore l’heure du coucher.